Lors de mes études à l’École Régionale des Beaux Arts de Rennes, j'ai eu la chance de pouvoir explorer plusieurs médiums: de la gravure à la photographie en passant par la vidéo, le dessin ou les installations. Incapable d'en choisir un plutôt qu'un autre, j'ai conservé dans ma pratique ces multiples outils, comme palette de mon univers, choisissant lequel utiliser selon les projets artistiques que je réalisais.
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L'Autre a toujours été au cœur de mes recherches et expérimentations, aussi bien en tant que sujet actif ou en tant que regardeur, actif aussi. Marcel Duchamp disait, il y a bien longtemps déjà, "Ce sont les regardeurs qui font le tableau"(1) ou l’œuvre en élargissant cette idée. Elle existe par eux et pour eux; non pour les instituions artistiques, qui relèvent plus souvent d'un marché financier que de l'Art lui même.
Dans mes P.A.I (Projet Artistique Interactif), je provoque la rencontre souvent autour de questions ou de mots à expliquer ("Y-a-il pour vous une Vraie question?", "Qu'est-ce qu'un "paysonge"?", "Quelle est la question que vous vous posez là, maintenant?" etc...). Ces échanges tendent à rendre visible l'intériorité sensible, l'au delà des apparences, "l'espace du dedans" pour reprendre le titre d'un recueil de poésie d'Henri Michaux (2). Ces P.A.I prennent la forme d'installations de photographies, de textes ou de vidéos et parfois de créations visuelles réalisées par les personnes sollicitées. "Après les voyages..." ou "Quelle sorte d'ile êtes-vous? " en sont des exemples, ce dernier est un livre unique qui rassemble des autoportraits, sous forme d'îles, tour à tour abstraites ou réalistes (visibles dans la catégorie "livres uniques").
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| "Après les voyages..." (P.A.I réalisé à partir de tickets de métro usagés - 2008/2009) |
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La Nature est un autre de mes axes de création, en tant que sujet de prises de vues (dans la catégorie "photographies numériques") ou en tant que source de "récoltes diverses". Dans mes natures mortes photographiques réalisées lors de mes études, j'ai mis en scène des déchets ramassés au fil de mes promenades à la manière de peintures hollandaises du XVIIème siècle. Plus tard, dans ma série photographique: "Objets perdus trouvés", je donnais à voir ces objets perdus qui peuplent nos paysages et leur conférent une touche mélancolique d’humanité.
A présent, je cherche davantage à réaliser des portraits sensibles de la Nature tout en interrogeant ce que nous appelons "Nature" aujourd'hui. Menacée, détruite, souillée, elle a bien évolué... Existe-t-il encore des "Zones libres"? Peut-on en recréer de manière naturelle? Comment représenter la Nature pour mieux la protéger?
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| "Re-belle!" photographie numérique de la Série "Zone Libre - Look up" (février 2019) |
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Mes projets artistiques actuels placent l'Autre et la Nature au centre de mes expérimentations, auxquelles s'ajoute le désir de mettre en mots des rencontres et questionnements quant à notre rôle en tant qu'humain et artiste (voir série en cours "Trois petits vers et puis s'en vont")
Dans son ouvrage "Un art écologique - Création plasticienne et anthropocène" (3), Paul Ardenne pose justement comme principe cette notion de responsabilité:"L'éco-artiste, contre la disruption, choisit son camp, poser les bases d'une restauration responsable de notre rapport d'humains à l'environnement, dans une perspective meilleuriste."
C'est donc à chacun de nous d'agir, ici et maintenant, pour un changement nécessaire à la construction d'un avenir commun. J'ai choisi d'être actrice de ce changement en modifiant mon mode de vie, en changeant de lieu de vie, en militant davantage dans des collectifs, en cultivant mon jardin et en axant ma création encore plus sur la Nature. Il me semble de plus en plus urgent d'être en cohérence avec soi même et de faire converger ses convictions avec ses actes.
Détails d'un poème visuel de la série "Trois petits vers et puis s'en vont"
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Pour conclure, je reprendrai les propos de Franz Kafka
en les élargissant à l'Art dans sa globalité; l'artiste doit -selon moi- réveiller ou interagir avec les consciences, interpeller l'Autre ou l'émouvoir, sans désespoir: "Il me semble d'ailleurs qu'on ne devrait lire que les livres qui vous mordent et vous piquent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d'un bon coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire(...) Un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. Voilà ce que je crois." (4)
(1) édité chez Gallimard en 1944.
(2) in Marchand du sel, Paris, Le Terrain Vague, coll. « 391 », 1959, édité par M. Sanouillet
(3) in "Un art écologique - Création plasticienne et anthropocène", 2018 , édité par La muette Le bord de l'eau.
(4) Citation extraite (traduite) d'une lettre de Franz Kafka à son ami Oskar Pollak en 1904:
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